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Un texte de chez Kazibao
La colombe d'un juif Partie 2

Lorsque j’entrai en classe dans le but de regagner mon banc habituel, au fond, près d’Olivier, quelqu’un siffla. Le maître fit mine de n’avoir rien entendu. Je m’installai, de plus en plus intimidé.
Alors, Olivier, mon ancien meilleur ami, celui qui avait joué avec moi, celui auquel j’avais confié tous mes secrets, leva le doigt et dit d’une voix dure, sans me regarder :
- Monsieur, s’il vous plaît. Je refuse qu’un juif s’asseye à côté de moi.
Il y eut un long silence. Ensuite, M. Neural, le maître, déclara, neutre, contemplant un oiseau dans la cour :
- Joseph Abraham Allier, allez vous asseoir auprès de Marc Collin.
Mais Marc protesta violemment. Les autres élèves firent de même. Si bien que le professeur s’énerva et décida que j’allais m’asseoir auprès de Hans, que ça lui plaise ou pas. Ce dernier prit alors un air boudeur et, durant tout le cours, m’insulta à voix basse, me traitant de chien, de sale juif, de traître. Puis, il poussa la cruauté jusqu’à me tordre discrètement les doigts, quand le maître ne regardait pas de mon côté. Terrifié, je n’osais rien dire et subissais ces petites tortures en silence.
Quel ne fut pas mon soulagement quand la dernière période s’acheva et qu’enfin, la cloche sonna ! Je m’empressai de sortir, bouleversé et plein de rage envers le monde entier. Je détestais surtout Hans et Olivier.
Soudain, je m’arrêtai net et poussai un cri en apercevant un spectacle qui me déchira le cœur : Les autres enfants, dont mon ancien meilleur ami, s’étaient rassemblés autour de l’amandier dans lequel Castafiora avait trouvé refuge. Chacun d’entre eux avait à la main son lance-pierre et tous bombardaient ma colombe, la seule amie qui me restait, la seule qui m’aimait encore, la seule qui m’acceptais tel que j’étais. Les pierres fusaient en sifflant, cassant des branches fleuries au passage, blessant mon oiseau, le déchirant de part en part. Cette fois, c’en était trop pour mon pauvre petit cœur meurtri. Une rage sourde m’envahit et les larmes me montèrent aux yeux. Je me mis à leur crier, à les supplier d’arrêter mais tous faisaient la sourde oreille. J’avais beau sangloter et hurler, protester et implorer, personne ne prêtait l’oreille à mes conjurations.
Puis, ce fut la fin.
Frédéric banda sa fronde.
La pierre siffla et frappa ma colombe en plein cœur.
Alors, elle dégringola et son misérable cadavre tomba sur le sol. Ensanglanté.
J’entends encore les hourras et les cris de joie, les rires et les ricanements, les applaudissements et les sifflements. Et puis le chuintement de la pierre. Et puis les pleurs d’un enfant, dans la nuit. D’un enfant qui n’en était plus un. D’un enfant qui m’étais devenu étranger. Les pleurs d’un enfant qui portait, sur sa poitrine une étoile jaune.
Une étoile qui déchira mon enfance.
Ecrit par CharlottAmorr, le Mercredi 21 Mai 2003, 18:58 dans la rubrique Textes de Cha'.